Des travaux de recherche de l’équipe de réanimation chirurgicale de l’hôpital Lariboisière ont permis de démontrer l’utilité d’une mesure du CO2 cutané, au lobe de l’oreille, pour vérifier l’état de l’irrigation sanguine des tissus chez les patients en état de choc. Ces travaux réalisés par le Dr Fabrice Vallée dans l’équipe du Pr Didier Payen ont été publiés dans la revue Chest.
Depuis une dizaine d’années, il est clairement établi que l’augmentation du CO2 tissulaire et veineux, observée au cours des états de choc, principalement d’origine septique, ne provient pas d’une augmentation de la production de CO2 par les cellules mais d’un défaut d’élimination du CO2. En effet, malgré la restauration chez les patients d’un débit cardiaque satisfaisant, une anomalie de la microcirculation sanguine peut persister provoquant un défaut d’irrigation des tissus, soit une hypoperfusion tissulaire. Un état qui génère l’accumulation du CO2 dans les tissus et peut directement engager le pronostic vital du patient.
C’est au niveau de la peau que la mesure du CO2 tissulaire est particulièrement sensible car au cours des états de choc, l’hypoperfusion tissulaire en y est majeure et précoce.
Dans cette étude et de manière intéressante, il est montré que la mesure cutanée du CO2 au lobe de l’oreille, qui est une zone richement vascularisée, augmente la réactivité de la mesure. Surtout, les résultats obtenus démontrent l’efficacité de la mesure qui permet d’évaluer de manière très fiable l’état de la microcirculation tissulaire, soit l’état de la perfusion tissulaire.
La mesure est effectuée en limitant la température du capteur à 37°C, ce qui permet d’éviter la vasodilatation « artificielle » habituellement induite en chauffant la peau avec le capteur entre 42°C et 44°C pour « artérialiser » le sang capillaire et obtenir, dans ce cas, une mesure qui reflète la pression artérielle de CO2, et non l’état de la perfusion tissulaire.
En service de réanimation, le suivi de la pression tissulaire de CO2 à 37°C semble particulièrement important à la phase initiale d’un état de choc. Cela peut renseigner sur la gravité et l’évolution de l’état du patient mais également guider la thérapeutique et suivre son efficacité.
De plus, pour le patient, la mesure au lobe de l’oreille offre l’avantage d’être facilement accessible et sans inconfort. Elle permet un monitorage facile, non invasif et continu pour le patient intubé.
Source :
Cutaneous Ear Lobe PCO2 at 37°C To Evaluate Microperfusion in Patients With Septic Shock. Chest 2010;138(5):1062-70. Fabrice Vallée, Joaquim Mateo, Guillaume Dubreuil, Thomas Poussant, Guillaume Tachon, Ingrid Ouanounou and Didier Payen. http://chestjournal.chestpubs.org/content/138/5/1062.full.html
From the Réanimation Chirurgicale et Laboratoire de Recherche du Département d’Anesthésie-Réanimation-SMUR (Equipe d’Accueil EA 3509 Université Paris 7 Denis Diderot), Hôpital Lariboisière, Assistance Publique-Hôpitaux de Paris, Paris, France.